Enchères

Portrait de femme à la japonaise

👘 Ce troublant tableau illustre l’intérêt marqué de Franz von Stuck pour l’exotisme. Si le peintre s’est souvent inspiré de costumes antiques ou méditerranéens, il s’aventure ici vers un Orient rêvé, nourri par la vogue du japonisme qui enflamme alors Munich.

L’œuvre montre une jeune anonyme, vêtue d’un kimono aux reflets mordorés, rehaussé d’un col rouge éclatant et serré d’une ceinture obi. Deux épingles à cheveux (kanzashi) piquées dans ses cheveux rappellent les accessoires traditionnels des geishas ou des mariées japonaises. Tête légèrement rejetée en arrière, la jeune femme fixe le spectateur d’un regard à la fois distant et souverain.

🏮 Le halo vert-brun du fond, dans lequel la silhouette semble presque se dissoudre, intensifie l’effet de mystère. L’artiste joue subtilement des contrastes et des couleurs : le teint diaphane s’oppose aux touches chaudes du vêtement, tandis qu’une lumière dorée réchauffe la peau. Son maquillage soigneusement travaillé rapproche le modèle d’un rôle théâtral : petite bouche ourlée de rouge, joues rosies d’un fard appuyé et teint de porcelaine, si caractéristiques des geishas.

Figure emblématique du symbolisme munichois, Franz von Stuck cultive un art où se mêlent mystère et sensualité. Influencé par la Renaissance autant que par les courants décadents de son temps, il excelle à donner à ses figures féminines une présence sculpturale et énigmatique, à l’instar de ce portrait.

🖤 Car, dans sa peinture, la beauté s’accompagne toujours d’une ombre : une tension entre attirance et menace, entre éclat des corps et profondeur du mystère. Ses figures, souvent enfermées dans des fonds obscurs ou baignées d’une lumière irréelle, semblent surgir d’un rêve un peu inquiétant. Cette obscurité symbolique, loin d’être purement décorative, révèle son intérêt pour les zones cachées de l’âme — l’érotisme, la mélancolie, la tentation, le sacré.

Réalisée à une époque où la culture japonaise fascinait l’Europe – depuis l’exposition universelle de 1873 jusqu’à la reprise triomphale du Mikado à Munich – cette peinture illustre la manière dont l’artiste s’empare de cet engouement pour en faire une métaphore du féminin universel, entre étrangeté et intimité.

✨ Ainsi, même dans un portrait apparemment paisible comme cette femme à la japonaise, on perçoit ce fond de gravité : la fixité du regard, le silence de la scène, l’absence d’espace autour du modèle créent une impression d’enfermement, presque de sortilège. C’est sans doute ce mélange de beauté et de menace, de calme et d’abîme, qui donne à Stuck sa singularité parmi les symbolistes européens.

Enchère à suivre ! 💫
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🗓️ Vendredi 14 novembre, 13h00 : Vente Karl & Faber (Munich) @karlandfaber

🔎 Lot 42 : Franz von Stuck (1863-1928), Portrait de femme à la japonaise (1899). Huile sur bois signée. Dim. 50,1 × 43,4 cm. [ 💸 30 000 – 40 000 € ]

crédit photo © maison de vente