Focus art

Léon Spilliaert

🖌️ En ce jour naquit Léon Spilliaert (1881–1946), figure singulière et envoûtante de l’art belge, dont l’œuvre oscille entre symbolisme et expression d’une mélancolie métaphysique.

Autodidacte, hypersensible et insomniaque, Spilliaert peint l’inquiétude de l’âme autant que la solitude des lieux. Il est né à Ostende, cette ville portuaire de la mer du Nord, battue par les vents, dont l’atmosphère étrange irrigue son œuvre tout entière.

🖤 Avant la fin de la Première Guerre mondiale, son univers revêt une tonalité particulièrement sinistre et tourmentée. Il est peuplé de silhouettes fantomatiques, d’autoportraits fiévreux, d’intérieurs vides et de paysages urbains désertés. À l’image d’Edvard Munch, dont il partage la profondeur psychologique et l’expression d’un mal-être existentiel, Spilliaert peint non pas ce qu’il voit, mais ce qu’il ressent.

Souvent réalisées à l’encre de Chine ou à l’aquarelle sur papier, ses œuvres semblent baignées d’un silence tendu, d’une lumière lunaire, voire spectrale. Rien de flamboyant chez l’artiste belge : tout est nuance, transparence, intériorité. Ses escaliers sans fin, ses digues plongées dans la brume, ses miroirs qui ne reflètent rien d’autre que le vide de l’être, sont autant de motifs récurrents d’un imaginaire hanté par l’absurde et la contemplation.

🥀 Son style, que l’on peut rapprocher de celui des symbolistes tardifs, mais aussi des expressionnistes, échappe pourtant aux catégories. Il semble inventer un langage plastique propre, quelque part entre la suggestion du rêve et la précision architecturale. Spilliaert a très peu voyagé, mais il a lu intensément : Nietzsche, Maeterlinck, Schopenhauer… autant de voix philosophiques qui nourrissent sa quête de sens dans un monde trouble.

Il expose en Belgique dès 1908, et attire vite l’attention de cercles intellectuels. Mais c’est dans l’ombre qu’il travaille le plus — comme s’il peignait pour conjurer ses angoisses. Certaines de ses œuvres les plus célèbres témoignent d’un art intensément psychologique, où la mer, la nuit et les figures solitaires deviennent des symboles existentiels.

Sa reconnaissance internationale est relativement tardive : il faut attendre les expositions du XXe siècle pour que son œuvre soit pleinement réévaluée. Aujourd’hui, les musées belges, mais aussi le Musée d’Orsay à Paris ou le MET à New York, conservent certains de ses travaux.

À bientôt sur Sfumato ! 💫

1. Autoportrait aux masques (1903). Musée d’Orsay.
2. Vertige (1908). Musée d’Art de la mer (Ostende).
3. Digue et plage (1907). Coll. privée. [ Vendu 693 000 £, Christie’s, 5 mars 2025 ]
4. La Buveuse d’absinthe (1907). Musée des Beaux-Arts de Gand.
5. Phare sur la digue (1908). Coll. privée. [ Vendu 982 800 £, Christie’s, 9 oct 2024 ]
6. Filles sur une dune. Coll. privée.
7. Digue et lumières d’Ostende (1909). Coll. privée. [ Vendu 403 200 €, Christie’s 4 avril 2023 ]
8. Autoportrait avec un carnet de croquis bleu (1907). Musée royal des Beaux-Arts d’Anvers.
9. Les Cavaliers dans la neige (1915). Coll. privée. [ Vendu 48 000 €. Lempertz, 31 mai 2025 ]
10. Berges boisées autour de l’étang du parc Marie- Henriette à Ostende (1931). Vendu 20 000 €, Hôtel de Ventes Horta, 19 mai 2025 ]
11. Arbre et ciel (1938). Musée d’Art à la Mer (Ostende).